Fabriqué par l’homme, le bocage constitue, notamment en Bretagne, un élément caractéristique du paysage rural,  issu de ses nombreuses transformations. Il se caractérise par la présence de haies, souvent implantées sur des talus, eux-mêmes bordés ou non par un fossé ; des bosquets plus ou moins nombreux parsèment également ce paysage et dans quelques cas moins fréquents, les talus sont restés nus. Ces différents éléments constituent un maillage plus ou moins serré qui délimite les parcelles agricoles. Un réseau de chemins permet l’accès aux différentes parcelles et renforce ainsi la structure du paysage.

Lié à l’abandon d’un usage collectif des terres, l’apparition du bocage au Moyen-Age traduit la volonté de délimitation de propriétés et le besoin de lutter contre la divagation des animaux d’élevage par l’implantation de haies souvent sur talus pour créer des clôtures « naturelles ». Mais d’autres fonctions sont également recherchées : l’effet « brise-vent » pour la protection du bétail des rigueurs climatiques (vent, pluies), la production de bois de chauffage et de bois d’oeuvre (meubles, charpente, outils,…). La création de fossés, associés aux haies renforce une autre fonction essentielle du bocage : l’amélioration de la circulation de l’eau.

Les vastes opérations de remembrement traduites par la disparition d’une forte proportion du bocage breton dans les années 1960/1990 ont révélé des fonctions essentielles, mal appréhendées à l’époque, mais qui sont maintenant bien connues :

– le système « haie-talus-fossé » ralentit l’écoulement de l’eau (meilleure infiltration, lutte contre les crues et l’érosion des sols) et assure une activité épuratrice liée (réduction des transferts latéraux et rétention/dégradation de certains polluants),

– il favorise par ailleurs une régulation micro-climatique à l’échelle parcellaire (réduction de l’assèchement des cultures, protection du bétail contre les fortes chaleurs), renforce la régulation biologique de certains ravageurs (constitution de refuge pour les prédateurs auxiliaires de l’agriculture) et permet le maintien de la biodiversité par la constitution d’habitats favorables à la flore et à la faune (refuges, garde-mangers, lieux de reproduction, lieux de circulation assurant le brassage génétique),

– la haie constitue une source de bois d’oeuvre, d’énergie renouvelable et de réduction des gaz à effet de serre  (constitution de puits de carbone),

– plus globalement, le bocage participe à la diversité et à la qualité esthétique des paysages.

Il n’y a pas eu de véritable opération de remembrement organisée sur la commune de Hédé-Bazouges. Cependant, reposant sur les mêmes objectifs, des restructurations d’exploitations, des échanges parcellaires à l’amiable et des évolutions dans les pratiques d’exploitation de ces parcelles ont eu lieu. Plus récemment, les demandes d’extension de l’habitat ont par ailleurs été relativement contenues.

Sur la commune de Hédé-Bazouges, le bocage a donc su résister aux principaux dommages collatéraux du remembrement et de l’urbanisation ; il constitue donc toujours un paysage agraire identitaire qu’il faut maintenant préserver en mobilisant de façon judicieuse les différents outils disponibles (législatifs, réglementaires, incitatifs, financiers,…)

Les intérêts manifestés pour une ou plusieurs des différentes fonctions du bocage ont donné naisssance à différents types de bocages spécifiques, présents sur la commune et caractérisés notamment par : la structuration des haies (avec une ou plusieurs strates de végétaux), leur composition (diversité des essences) et leur positionnement dans le paysage (par rapport à la pente, dans le bassin-versant, par rapport aux vents dominants), le modelage du terrain associé aux haies (avec ou sans talus, doublé ou non de fossé), la densité des haies en lien avec le maillage parcellaire et sa plus ou moins bonne connectivité.

La question de la charge d’entretien du bocage reste aujourd’hui posée. Pendant de nombreuses années ceux qui entretenaient le bocage en étaient les utilisateurs et consommateurs ; les coûts de conservation et d’entretien (main-d’oeuvre, matériel, énergie) étaient compensés par une rémunération directe ou par des économies réalisées sur des postes de dépenses privées. Aujourd’hui, au delà de ses usages et fonctions traditionnelles valorisables par certains ruraux (quasi exclusivement les agriculteurs), le bocage doit répondre à différentes attentes sociétales (écologique, esthétique, patrimoniale). De nouveaux acteurs (citadins, néoruraux) sont apparus et expriment leurs besoins en tant que « consommateurs de paysage » ; dans la plupart des cas, ils attendent des seuls agriculteurs qu’ils remplissent des fonctions publiques d’entretien sans y associer une valeur marchande. Les agriculteurs de leur côté sont contraints de prendre en considération le rapport coût/bénéfice du maintien et de l’entretien du bocage. L’intérêt et les efforts que représentent la conservation et la préservation du bocage sont donc différemment perçus selon que l’on soit acteurs ou consommateurs du monde rural. 

Ce n’est pas en augmentant les contraintes imposées aux agriculteurs sans prendre en compte leur acceptabilité sociale (conséquences notamment sur le revenu et le temps de travail) que seront construites les vraies dynamiques locales collectives, garantes de la préservation du bocage. Il est temps de réfléchir aux meilleures façons de rémunérer les services gratuits rendus par les agriculteurs à l’environnement et l’échelle communale est sans doute la plus appropriée pour faire partager à tous ces enjeux.